Introduction
Le mûrier, appartenant à l'espèce Morus, est un arbre fruitier valorisé pour son fruit sucré, ses feuilles servant à l'alimentation des vers à soie, et son rôle dans les écosystèmes naturels et cultivés. Les espèces les plus courantes sont les Morus alba (mûrier blanc), les Morus nigra (mûrier noir), et les Morus rubra (mûrier rouge). Le mûrier blanc, originaire d'Asie orientale, est le plus largement cultivé pour la sériciculture, tandis que le mûrier noir, apprécié pour ses fruits savoureux, trouve ses racines en Asie occidentale. Le mûrier rouge est natif d'Amérique du Nord et est reconnu pour sa rusticité et la qualité de ses fruits. Chaque espèce présente des caractéristiques uniques en termes d'adaptabilité, de croissance, et de besoins culturales, contribuant à une large variabilité écologique au sein du genre.
Conditions de Culture
Exposition
Le mûrier prospère dans des conditions de plein soleil à mi-ombre. Une exposition directe au soleil favorise une floraison et fructification abondantes, particulièrement chez les espèces comme Morus nigra et Morus rubra. D'un point de vue général, les mûriers sont placés en plein soleil en Belgique (ensoleillement limité).
Sol
Les mûriers sont tolérants à une large gamme de sols mais préfèrent les sols riches, profonds, et bien drainés avec un pH neutre à légèrement acide. Le mûrier blanc s'adapte particulièrement bien aux sols légèrement calcaires.
Eau
Bien que résistants à la sécheresse une fois bien établis, les jeunes arbres bénéficient d'un arrosage régulier, surtout pendant les périodes sèches. Un apport d'eau adéquat est crucial durant la première année de croissance pour assurer un bon enracinement.
Espacement
Un espacement de 1 à 15 mètres entre les arbres est recommandé, selon la taille adulte prévue et le but de la culture (fruits, feuille, ombrage, haie, verger, multiplication de plants). Voici un aperçu des différentes possibilités dans des cultures au Pakistan:
(A) Environ 1,5 m x 1,5 m (B) Environ 3 m x 0,9 m (C) Environ 3 m x 3 m (D) Environ 3 m x 2,4 m. (E) Environ 4,3 m x 3 m. (F) Environ 4,3 m x 2,4 m
Fertilisation
Une fertilisation légère peut être bénéfique au démarrage de la croissance printanière. Utiliser un compost mûr ou un engrais équilibré en NPK favorise la santé générale de l'arbre.
Floraison et Fructification
La floraison survient généralement au printemps, suivie de la fructification en début à mi-été, selon les conditions climatiques, l'espèce et la variété. Certaines variétés peuvent produire deux récoltes par an dans des climats plus chauds. Et d'autres sont capables de produire sur une période de 3 mois (Hicks Everbearing en Louisiane). En général, les Morus Rubra et les hybrides Rubra x Alba échappent aux gelées de printemps. De bon candidats pour la Belgique donc. Les rendements d'un murier vont de quelques kilos pour un arbre jeune à 300kg pour un murier en forme libre de 30 ans.
Taille
La taille est effectuée en hiver pour les arbres en dormance, visant à éliminer les branches malades, endommagées ou enchevêtrées, et à maintenir la structure de l'arbre. La formation d'un jeune murier est différente en fonction de ses objectifs (autonomie, production de fruit ou de fourrage), mais de manière générale une forme en gobelet à 2 ou 3 charpentes est pratiquée, avec un raccourissement des tiges pour encourager le développement de petites branches latérales, très fructières.
Verger de murier pakistanais en Californie. 2 à 4 charpentes par arbre, maintenus à 3m de hauteur pour de l'autocueillette.
Maladies & ravageurs
Les mûriers sont résistants à la plupart des maladies et ravageurs, mais une vigilance est nécessaire pour identifier rapidement tout signe de stress ou d'infection. Le mûrier est modérément affecté par le chancre et par la maladie du popcorn (Ciboria carunculoides). Attention aux limaces quand les arbres sont jeunes ; elles raffolent des bourgeons et des jeunes feuilles. Les campagnols terrestres peuvent aussi poser certains problèmes.
Fourrage
Le mûrier, au-delà de son rôle primordial dans la sériciculture (vers à soie), s'avère être une source de fourrage exceptionnelle pour une variété d'animaux d'élevage. Ses feuilles, enrichies en protéines de 18 % à 25 % de leur poids sec, présentent une excellente digestibilité, ce qui les rend particulièrement adaptées à l'alimentation des bovins, chèvres, porcs, lapins, et même, bien que moins fréquemment, des volailles. Cette capacité du mûrier à fournir entre 20 et 30 tonnes de feuilles par hectare et par an le positionne comme une alternative nutritionnelle de premier choix, surtout dans les zones où les options de fourrage frais sont limitées.
Ici les mûriers sont placés en rang serrés pour la production de feuilles (Vers à soie)
Parallèlement, les feuilles de mûrier cultivent une réputation bienfaisante chez les humains, notamment sous forme de thé en Corée. Ce thé, riche en vitamines B, C, D, et en flavonoïdes, est reconnu pour ses vertus nutritionnelles et thérapeutiques. Certaines anecdotes lui attribuent même le pouvoir de renverser le grisonnement des cheveux, témoignant de la richesse et de la diversité des bienfaits du mûrier.
La préparation du thé de mûrier est à la fois simple et accessible. Après la récolte manuelle des feuilles, un séchage rapide au soleil transforme ces dernières en ingrédients prêts à infuser. Une infusion de quelques feuilles dans de l'eau chaude suffit pour créer une boisson au goût agréable, promettant, selon certains, des effets bénéfiques sur la santé générale et peut-être même sur la pigmentation des cheveux.
Résistance au froid
il est essentiel de noter la remarquable adaptation de ce genre à diverses conditions climatiques, en particulier en ce qui concerne sa résilience au froid. Les trois espèces principales de mûrier, Morus alba, Morus nigra et Morus rubra, présentent chacune des degrés de résistance au froid qui contribuent à leur distribution géographique et à leur utilité dans les systèmes agricoles et écologiques.
Morus alba, ou le mûrier blanc, est réputé pour sa robustesse dans des conditions hivernales modérées, capable de survivre jusqu'à des températures minimales d'environ -25°C. Cette résistance en fait un choix adapté pour les régions aux hivers froids, permettant non seulement sa culture pour les fruits mais aussi pour les feuilles utilisées dans l'élevage des vers à soie.
Morus nigra, le mûrier noir, peut généralement tolérer des températures allant jusqu'à -20°C, bien que sa capacité à survivre à l'hiver dépende aussi de sa localisation et des conditions de croissance spécifiques. Cette espèce est particulièrement appréciée pour ses fruits succulents, ce qui justifie les efforts pour la cultiver dans des zones aux hivers plus doux.
Enfin, Morus rubra, ou le mûrier rouge, originaire d'Amérique du Nord, montre une bonne résistance au froid, comparable à celle de Morus alba. Capable de résister à des températures allant jusqu'à -25°C ou -30°C, cette espèce s'adapte bien à une large gamme de climats tempérés, offrant une source de nourriture tant pour la faune sauvage que pour l'usage humain.
Cueillette et Conservation
Les fruits mûrissent sur une période de plusieurs semaines. Ils sont fragiles et se conservent peu de temps après la cueillette, nécessitant une consommation rapide ou une transformation en conserves, jus, ou séchage.
Récolte Directe : Les cueilleurs grimpent souvent dans les arbres ou utilisent des échelles pour atteindre les fruits. Ils cueillent les mûres mûres directement dans des paniers ou des seaux, en prenant soin de ne pas endommager les fruits tendres. Cette méthode est particulièrement utilisée pour les mûres destinées à la consommation fraîche ou à la vente directe sur les marchés locaux.
Secousse : Pour les mûriers plus grands et les plantations destinées à la production de fruits en masse, les agriculteurs étendent des draps ou des bâches sous les arbres. Ils secouent ensuite les branches, soit manuellement soit à l'aide de bâtons, pour faire tomber les fruits mûrs sur les toiles. Cette méthode permet de récolter rapidement une grande quantité de fruits sans monter dans l'arbre. Les fruits sont ensuite ramassés à la main depuis les toiles.
Récolte par secousse à la ferme Habitera en Californie. Récolte de mûres du Pakistan (Morus Macroura).
Cueillette des Feuilles : En plus des fruits, les feuilles de mûrier sont essentielles pour l'alimentation des vers à soie dans la production de soie, une industrie importante dans plusieurs pays asiatiques. Les feuilles sont généralement cueillies à la main pour assurer leur intégrité, ce qui est crucial pour la santé des vers à soie. Cette récolte se fait avec soin pour ne pas nuire à la croissance future de l'arbre.
Mécanisation Partielle : Bien que la récolte manuelle soit prédominante, certains producteurs commencent à utiliser des équipements mécanisés pour faciliter la récolte, en particulier pour les feuilles destinées à l'industrie de la soie. Cela inclut des sécateurs mécaniques et des dispositifs de secouage motorisés pour les branches, permettant une récolte plus efficace et moins laborieuse.
Post-Récolte
Traitement Immédiat : Les mûres récoltées sont souvent triées et lavées peu de temps après la récolte. Pour la vente fraîche, les fruits sont conditionnés avec soin pour minimiser les dommages. Pour d'autres utilisations, comme la séchage ou la transformation en confitures ou jus, les fruits peuvent être traités sur place ou transportés vers des installations de transformation.
Variétés
Il existe de nombreuses variétés cultivées pour leurs qualités spécifiques, telles que la taille du fruit, la saveur, et la période de maturation. La sélection d'une variété adaptée à son climat et à ses besoins est essentielle pour une culture réussie.
Voici 3 variétés qui nous semblent les plus intéressantes pour la Belgique. Vous pouvez découvrir nos variétés de mûriers ici.
Illinois Everbearing (Morus Alba x Rubra)
L'Illinois Everbearing est un mûrier hybride résistant au froid, idéal pour les climats avec des gelées tardives. Sa période de fructification s'étend de début juillet à fin août, offrant une ombre dense en été grâce à sa croissance rapide. Avec une résistance jusqu'à -25° Celsius, cet arbre est aussi robuste face aux maladies et ravageurs. Ses fruits, de 2,5 cm de long, se distinguent par leur facilité de cueillette et leur conservation prolongée, rendant la variété attractive pour la culture commerciale.
Gerardi Dwarf (Morus Alba x Rubra)
Le Gerardi Dwarf est un mûrier nain, parfait pour les espaces restreints, introduit par Louis Gerardi. Sa particularité réside dans sa croissance lente et la faible distance entre ses entrenœuds, permettant de maintenir une taille compacte. Malgré sa stature réduite, il produit des fruits de taille normale, sucrés et juteux, avec une saveur profonde. Cette variété est surtout adaptée aux zones jusqu'à la zone 8 et peut ne pas prospérer dans des climats plus chauds.
Black Italian (Morus alba)
Le Black Italian est une variété de mûrier blanc (Morus alba) produisant de gros fruits noirs/rouges, qui peuvent être consommés même avant maturité, offrant une texture croquante et une saveur très sucrée. Cette variété se caractérise par ses fruits volumineux et sa haute teneur en sucre, ce qui en fait un choix populaire pour la consommation fraîche et diverses transformations culinaires.
En Belgique
La culture du mûrier reste méconnue, mais grâce à l'engagement de quelques pépiniéristes, le mûrier a trouvé sa place dans de nombreux jardins belges au cours des dix dernières années. Il s'adapte parfaitement au climat tempéré de la Belgique et produit des fruits de qualité dès le début de l'été (juillet/août). À la pépinière et sur notre parcelle, nous avons planté 60 variétés dans le but de sélectionner celles qui sont les plus adaptées au climat tempéré belge. Notre sélection est actuellement en cours.
Conclusion
En conclusion, le mûrier se révèle être une plante d'une grande utilité, non seulement pour ses fruits mais également pour ses feuilles qui servent de fourrage et sont utilisées dans diverses préparations culinaires et médicinales. Sa capacité à s'adapter à divers environnements et sa résistance aux conditions difficiles telles que les sols pauvres et les faibles précipitations font de lui une option viable pour l'agriculture durable et les systèmes de permaculture.
Les avantages du mûrier s'étendent au-delà de l'alimentation animale, avec des implications positives pour la santé humaine et l'environnement. La culture du mûrier peut contribuer à la lutte contre l'érosion du sol et offrir une source de revenu supplémentaire grâce à la vente de fruits, de feuilles, et même de produits dérivés comme le thé de feuilles de mûrier.
Toutefois, la culture du mûrier requiert une attention particulière concernant certaines menaces telles que les limaces et les campagnols terrestres, surtout pour les jeunes arbres. Ces défis soulignent l'importance d'une gestion agricole informée et attentive.
Dans un contexte de recherche de solutions agricoles durables et respectueuses de l'environnement, le mûrier offre des possibilités intéressantes. Il incarne l'intersection entre les pratiques agricoles traditionnelles et les approches modernes de l'agriculture durable, en fournissant une ressource à la fois résiliente et bénéfique pour une large gamme d'usages.
Ainsi, le mûrier représente une composante précieuse des systèmes agricoles durables, en offrant des avantages écologiques, économiques et sociaux. Sa culture et son utilisation méritent d'être considérées et intégrées dans les stratégies agricoles et environnementales, en vue de promouvoir une interaction harmonieuse et durable avec notre écosystème.
https://www.fao.org/3/X9895E/x9895e09.htm
https://www.sare.org/wp-content/uploads/mulberrybooklet.pdf